Droits des enfants en RDC

La protection légale et judiciaire des enfants en RDC  Problèmes centraux et propositions Ce document a été préparé conjointement par le Bureau International Catholique pour l’Enfance, la Section Protection de l’Enfance de la MONUC, Save the Children UK et l’UNICEF, comme document de discussion pour faciliter l’identification de reformes nécessaires et adéquates dans la protection et la justice pour enfants.   BICE. En République Démocratique du Congo depuis 1996, le Bureau International Catholique de l’Enfance assure la promotion et la protection des droits de l’enfant dans le cadre de son programme « Enfants abusés » contenant les volets ci-après: enfants privés de liberté ou accompagnant leur mère en détention, enfants dits sorciers, filles en situation difficile et enfants associés aux forces et groupes armés. Le BICE développe ses activités à Kinshasa et dans les provinces du Kasaï Oriental et du Kasaï Occidental.  
   La Section Protection de l’Enfance (PE) de la MONUC mène des activités de surveillance, de documentation et de plaidoyer surtout sur les thèmes liés aux enfants affectés par le conflit armé. Elle facilite l’appui aux victimes et le renforcement des structures étatiques à travers la formation.  Elle assure également l’intégration de la protection de l’enfant dans tous les programmes de la MONUC.   Pour la préparation de ce document, la SPE a fait une analyse des données récoltées entre les mois de janvier et septembre 2004, dans les prisons de Bunia, Kisangani, Goma, Kalémie, Kananga, Kinshasa, Beni, Bukavu et Lubumbashi et les cachots du commissariat de police de Kamalondo, Kenya et du TGI de Lubumbashi.    
Save the Children UK (SCUK) travaille en RDC depuis 1994 dans la protection et la réunification des enfants séparés de leurs familles, suite au génocide rwandais, et dès 1999, dans la réunification et la réinsertion des enfants associés aux forces et groupes armés dans les Nord et Sud Kivu. Dans le Kasaï Oriental et à Kinshasa, SCUK développe des projets destinés aux enfants de la rue, à ceux accusés de sorcellerie et aux enfants en conflit avec la loi. La section Protection de l’UNICEF. Le programme protection des groupes vulnérables de l’UNICEF comporte deux projets. Le premier, concernant la protection légale et sociale des enfants et des femmes vulnérables, traite la connaissance et l’application de la loi, l’accompagnement psychosocial et judiciaire et enfin la réinsertion familiale ou des alternatives. Le deuxième projet, concernant la protection des enfants, femmes et familles affectés par le conflit armé, comprend le développement et la coordination du programme DDR, l’assistance et l’appui à la réintégration des enfants associés aux forces et groupes armés, et enfin l’accompagnement des enfants et des femmes victimes d’abus sexuels.  Le programme protection légale de l’enfant contribue au respect et à l’application des droits des enfants en situation de forte précarité. Le projet de réforme de la justice juvénile et celui du code de protection de l’enfant sont en cours d’harmonisation avec les conventions internationales.

INTRODUCTION : La protection légale, judiciaire et sociale des enfants est extrêmement faible, voire inexistante en République Démocratique du Congo.  Les enfants en conflit avec la loi, en situation de risque, victimes de violences ou d’exploitation sont profondément affectés par la défaillance ou l’absence de mécanismes de protection, y compris l’impunité quasi-totale pour les auteurs des abus. L’audit sur la Justice en RDC mené par l’Union Européenne est une bonne occasion pour se pencher sur ces problèmes, qui n’ont pas reçu –jusqu’à présent- l’attention qu’ils méritent. Le but de ce document est ainsi de montrer les principales défaillances dans la protection légale, judiciaire et sociale des enfants, traitées dans trois grandes parties : 1. 2. 3. Le cadre légal et institutionnel pour la protection des enfants La justice et la protection de l’enfant en conflit avec la loi La justice et la protection des enfants en situation de risque ou victimes de violence et d’exploitation.  Le rapport comprend également des recommandations sur les actions à entreprendre dans les court, moyen et long termes.  1.  LE CADRE LÉGAL ET INSTITUTIONNEL POUR LA PROTECTION DES ENFANTS 1.1 :
Cadre légal La RDC a ratifié les principaux traités internationaux qui protègent les droits de l’enfant, notamment la Convention sur les Droits de l’Enfant (CDE) et ses deux Protocoles Additionnels1, et la Charte Africaine sur les Droits et le Bien-être de l'Enfant. Ceci est particulièrement important car, le système légal de la RDC étant un système « moniste », les dispositions des traités internationaux sont directement applicables et peuvent être invoquées dans des décisions judiciaires. Plusieurs dispositions de l’Acte Constitutionnel de Transition (Arts.9-30) sont conformes à l’esprit de la CDE et aux normes des Droits de l’Homme. Ce texte peut toutefois être fortifié et des propositions dans ce sens seront soumises plus tard dans le contexte de la rédaction de la nouvelle constitution. L'application et le contenu de certaines lois présentent néanmoins des insuffisances et des contradictions avec les normes internationales, notamment :  Le Code Pénal Le Code Pénal congolais sanctionne un nombre d’infractions qui sont souvent commises à l’égard des enfants, tels que les coups et blessures et le viol. Quelques points pourtant méritent d’être soulignés.  1Le Protocole facultatif à la CDE concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés; entré en vigueur le 12 février 2002 et ratifié par la RDC en novembre 2001, le Protocole facultatif à la CDE sur la vente, prostitution et pornographie d’enfants, entré en vigueur en janvier 2002 et aussi ratifié par la RDC.

       
Le Code Pénal :
réprime les actes d’immoralité sur les enfants (art. 167 à 177). Or, la fille mineure, en matière de viol, a été démunie de protection en rabaissant l’âge nubile de 16 à 14 ans par le Code de la Famille. Le Code Pénal ne définit ni ne sanctionne de manière générale ou spécifique la torture ou les mauvais traitements contre les enfants. La torture n’est prévue que par rapport à l’arrestation arbitraire, dont la peine est aggravée si la victime a été soumise aux tortures corporelles et si celles-ci ont entraîné sa mort. (Articles 67 et 68 du CPL II).  L’article 178 réprime la propagande antinataliste. Cette dernière disposition ne facilite pas certaines campagnes initiées par le Conseil National des Naissances Désirables.   Le Code de la Famille a le mérite d’avoir unifié les règles régissant la personne et la famille et de les avoir adaptées à la culture congolaise et à certaines exigences du monde moderne. Cependant, certaines de ses dispositions ne protégent pas suffisamment les droits de l’enfant. L’article 243 ne reconnaît pas au mineur le statut d’enfant abandonné, lorsque le défaut d’entretien est exclusivement dû au manque de ressources de ses parents. Cela exclut ipso facto la protection de l’Etat prévue à l’art. 239.   L’article 352 qui autorise le mariage des filles de 15 ans instaure une discrimination sexuelle puisque le mariage des garçons n’est autorisé qu’à 18 ans. La régularité du mariage précoce des jeunes filles peut également porter atteinte à leur droit à l’éducation et à la santé, en favorisant l’interruption prématurée du processus de scolarisation et des grossesses à risque. Enfin, les règles organisant les fiançailles et le mariage relèvent de la coutume et dans la pratique certaines de ces règles sont rétrogrades et préjudiciables, particulièrement pour la fille.
Le Code du Travail:
Le Code du Travail réglemente le travail de l’enfant (ex. durée et conditions de travail), mais reste inadapté à la conjoncture économique (dominée gravement par le secteur économique informel ou la débrouillardise) qui favorise les violations en matière de travail de l’enfant. Néanmoins le Code du Travail a été réformé et il interdit les pires formes de travail des enfants ainsi qu’il a relevé l'âge minimum pour l’emploi à 16 ans.  La loi sur l’enfance délinquante:
Le décret du 6 décembre 1950, complété par l'ordonnance loi n°78/016 du 4 juillet 1978 relatif à l'enfance délinquante constitue le texte de base qui organise l'administration de la justice juvénile en RDC. Ce texte est non seulement méconnu par la plupart de ceux appelés à l'appliquer mais il n'est plus adapté au contexte sociologique de la RDC suite à la guerre et aux crises socioéconomiques, encore moins aux engagements internationaux du pays (traités sur les droits humains ratifiés par la RDC). Tout d’abord, sous le chapeau de « l’enfant délinquant » la loi prévoit des mesures judiciaires pour les enfants qui ont commis des infractions ainsi que pour ceux livrés au « vagabondage et la
mendicité, l’inconduite et l’indiscipline notoires, la débauche ou le jeu ». Ainsi, les enfants dits « déviants » sont en quelque sorte associés aux enfants infracteurs, pour lesquelles le juge peut prendre le même type de mesures de garde et rééducation (Art. 2 du décret loi du 6 décembre 1950 sur l’Enfance Délinquante). Dispositions relatives au recrutement des enfants La loi sur la défense interdit le recrutement des mineurs au sein des Forces Armées Congolaises. Le contrevenant à cette disposition commettrait une « violation de consignes », étant ainsi passible de servitude pénale de 3 à 10 ans (Arts.113 et 114 du Code Pénal Militaire sur la violation de consignes).  Aussi le Code de Travail abolit toutes les pires formes de travail des enfants. Les pires formes de travail des enfants comprennent notamment toutes les formes d’esclavage ou de pratiques analogues, telles que le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés. De plus, la RDC a ratifié le Statut de la Cour Pénal Internationale qui incrimine le recrutement d’enfants de moins de 15 ans comme crime de guerre. Cette disposition fait partie de la législation interne en vertu de l’applicabilité directe des traités internationaux en RDC (Art. 194 de la Constitution e la transition). Mais, afin d’arrêter l’impunité à travers le système juridique national, il est important que l’avant-projet de Loi portant sur la mise en oeuvre du Statut de la Cour Pénale Internationale soit adopté. En effet ledit projet de loi reconnaît expressément comme crime de guerre le recrutement et l'utilisation d'enfants de moins de 18 ans dans les conflits armés et établit les sanctions pénales et les tribunaux compétents pour ces cas.  De plus, le Code de Justice Militaire (Loi No. 023/2002 du 18 novembre 2002) exclut les enfants de moins de 18 ans de la juridiction des cours militaires. Les dossiers d’un certain nombre d’enfants ont été ainsi transférés aux tribunaux civils grâce au plaidoyer des organisations des droits de l’homme et de protection de l’enfant. Toutefois certains auditorats militaires refusent encore d’appliquer la loi. 1.2. Cadre institutionnel Cadre institutionnel gouvernemental Le cadre institutionnel étatique pour la protection des droits de l’enfant en RDC se retrace généralement dans les attributions des ministères suivants : (i) des affaires sociales, principalement, (ii) de la condition féminine et la famille, (iii) de la solidarité nationale et les affaires humanitaires, (iv) de la santé publique, (v) de la jeunesse et des sports, (vi) de l’enseignement primaire, secondaire et professionnel, (vii) de la défense nationale, démobilisation et anciens combattants, (viii) de l’Intérieur, (ix) du travail et de la prévoyance sociale, (x) de la Justice, (xi) des droits humains, (xii) de la Fonction publique, ainsi que d’un nombre d’ organes de coordination tels que le Conseil National de l‘Enfant. Toutes ces institutions étatiques souffrent cependant de graves dysfonctionnements et d’une sérieuse incapacité, liés non seulement au manque d’harmonisation et au dédoublement des rôles et responsabilités en rapport avec la protection sociale des groupes vulnérables, mais aussi, aux faibles moyens mis à leur disposition (accentués par la dispersion des moyens disponibles), à la vétusté et à la sous-utilisation des infrastructures existantes et enfin à l’insuffisance des capacités des agents (par rapport aux connaissances, compétences et outils actuels).   
A titre illustratif, il sied de relever les fusions et scissions successives du Ministère des Affaires sociales tantôt avec le Ministère de la Santé, avec celui de la Famille et même avec celui de la Jeunesse et des Sports.   Cadre institutionnel non gouvernemental Pendant la dernière décennie, la RDC a vécu une prolifération d’associations sans but lucratif ayant affaire aux enfants. La majorité d’entre elles s’occupe de l’hébergement des enfants.  La loi 004 du 20 juillet 2001 sur l’octroi de l’autorisation de fonctionnement aux ONG a favorisé une certaine confusion.  D’après l’article 3 de cette loi, la personnalité juridique est accordée par le Ministre de la Justice, après avis favorable du Ministre ayant dans ses attributions le secteur d’activités visé.  Dans la pratique, les associations ont affaire à de très nombreuses sollicitations de la part de la commune, du Ministère de l’Intérieur et/ou d’autres ministères de tutelle présumés. La plupart des organisations fonctionnent avec des autorisations provisoires, mais, par ailleurs, plusieurs autorisations provisoires et personnalités juridiques ont été données par les uns et les autres en violation des procédures établies.  Il est à souligner qu’il existe un décalage entre l’autorisation de fonctionnement provisoire –ou la personnalité juridique- et la nature des activités autorisées.  Ainsi des églises se retrouvent, par exemple, à héberger des dizaines d’enfants séparés de leurs familles et des orphelinats se voient accueillir des enfants souffrant de malnutrition sévère. Par ailleurs un certain nombre de ces organisations sont accusées de maltraitance ou d’exploitation d’enfants.    Finalement, il a été rapporté que des associations reconnues comme étant crédibles par la communauté et par des partenaires qui travaillent dans la protection de l’enfant, subissent de longs mois d’attente avant de recevoir l’autorisation de fonctionnement ou la personnalité juridique. Ceci met parfois en danger la continuation de leur travail.

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